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vendredi 23 septembre 2016

Temps pour la création - V

Pourquoi les églises devraient avoir le souci de l'écologie ? 
Pour dénoncer l'aliénation de l'homme et de la création dans un système idolâtrique - quand ceux qui possèdent se prennent pour Dieu ? C'est la réponse que je lis à travers ces quelques pages extraites de "la terre comme soi-même" de Michel Maxime Egger :

L'émergence du capitalisme correspond, historiquement, à la bifurcation paradigmatique de l'Occident. L'ordre marchand apparaît à la fin du Moyen-Âge. Il est poté par la bourgeoisie naissante et favorisé par la Réforme qui brise l'interdit biblique du prêt à intérêt, ouvrant la voie à l'argent produisant de l'argent par lui-même et sans contrepartie matérielle. L'idée que l'être humain est "séparé" de la nature, qu'il en est le maître par sa raison et sa technique et qu'il peut en user comme bon lui semble, va fournir le terreau du développement économique. Qu'est-ce que le développement, en effet, sinon "un ensemble de pratiques parfois contradictoires en apparence qui, pour assurer la reproduction sociale, obligent à tansformer et à détruire, de façon généralisée, le milieu naturel et les rapports sociaux en vue d'une production croissante de marchandises destinées, à travers l'échange, à la demande solvable" (G. Rist, le développement, Histoire d'une croyance occidentale, p. 26-36). Jusqu'il y a peu, l'humanité à considéré ce "milieu naturel" comme infini. D'où le mythe du progrès (continu) et de la croissance (illimitée), avec tout ce qui en découle pour la nature en termes d'exploitation de ressources, de pollution et de production de déchets. 

Dans une perspective écospirituelle, le capitalisme est beaucoup plus que ce que les études historiques et socioéconomiques en disent. Celles-ci montrent davantage ce que le système fait et ses effets, que ce qu'il est. Or, comme l'avait bien compris le philosophe Max Weber, le capitalisme n'est pas seulement un système de production et de distribution de richesses. Il est aussi une forme d'esprit, un imaginaire, un mode d'organisation sociale de l'existence individuelle fondée sur une vision du monde, de l'être humain et du temps ainsi que sur un ensemble de valeurs et "d'axiomes culturels" : croissance, travail, efficacité, concurrence, innovation, propriété, consommation. Sa logique profonde, qui atteint d'une certaine manière son point culminant avec la mondialisation, est la réification de tout ce qu'il touche, c'est à dire la transformation progressive en "chose" et en "marchandise", en "objet" mesurable, consommable, privatisable, commercialisable et manipulable, grâce à des techniques de plus en plus sophistiquées. Avec une priorité : la valorisation du capital. 

Considérée comme un objet d'observation, disséquée comme un cadavre, mise en équation selon un ensemble de lois physiques et de mécanismes biologiques, la nature a été rendue intégrable à la logique utilitariste de l'économie. Privée de tout mystère, vidée de toute intériorité et présence divine, n'ayant plus que sa matérialité à offrir, elle a été perçue comme un environnement et un capital. Un stock de ressources, un paquet de gènes et un décor à disposition de l'humanité qui peut l'exploiter, la transformer et se l'approprier. Pour la satisfaction de ses besoins et envies, exacerbés par la course effrénée au profit et à la consommation. Comme l'écrivait prophétiquement l'économiste John Maynard Keynes, "la même règle autodestructrice du calcul financier régit tous les aspects de l'existence. Nous détruisons la beauté des campagnes parce que les splendeurs de la nature, n'étant propriété de personne, n'ont aucune valeur économique. Nous serions capables d'éteindre le soleil et les étoiles parce qu'ils ne rapportent aucun dividende". 

De fait, rien aujourd'hui n'échappe à l'emprise du capitalisme. Ni les éléments du vivant comme la terre, l'eau, l'air (le CO2)et les gènes, ni les biens et les services publics comme la santé et l'éducation. Nous ne sommes plus seulement dans une économie de marché, mais dans une société de marché. Le philosophe et psychanalyste catholique Maurice Bellet a appelé "écorègne" ce modèle de développement en voie d'expansion planétaire. Un "règne" où l'économie devient une fin en soi, la "fonction majeure" de la société qui soumet toutes les activités humaines à sa soi-disant rationalité, à ses critères et à ses principes proprement "délirants". Principe technologique : "Tout ce qui est possible, nous le ferons". Principe économique : "Tout ce qui nous fait envie, nous l'acquerrons". A quoi on pourrait ajouter un principe financier : "Tous les profits potentiels, nous les réaliserons". Productivité, rentabilité, compétitivité sont aujourd'hui les nouvelles tables de la loi". 

MM Egger, La terre comme soi-même, Labor & Fidès, p. 62-64

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